L’épuisement des énergies fossiles, facteur limitant du réchauffement climatique ? mémoire d’Olivier Raguenes, 2019.

Depuis le début de la mobilisation climatique, marquée par la signature de plusieurs accords engageants, comme celui de Kyoto, puis plus récemment ceux de Paris en 2015, les émissions de GES (gaz à effet de serre) ne cessent de croître, suivant la hausse de la consommation d’énergie fossile à l’échelle globale (+2% en 2018 [BP, 2019]). Le réchauffement climatique d’origine anthropique a déjà été mesuré à +1°C à l’échelle globale depuis la période 1850-1900, et les modélisations du GIEC (groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) font craindre une hausse bien plus importante d’ici 2100. La trajectoire climaticide empruntée par nos sociétés s’inscrit dans les scenarii “ business-as-usual ” (ou “maintien du statu quo ”) du GIEC, selon lesquels nous n’opérerons pas d’inflexion de nos émissions de GES malgré les bouleversements climatiques à l’oeuvre.

Notre croissance économique, industrielle et territoriale, est jusqu’à présent liée à l’exploitation des énergies fossiles carbonées : gaz, charbon et pétrole, qui permettent notamment la production et le déplacement, éléments vitaux de nos sociétés. Ainsi, nous sommes à la fois contraints mais aussi stimulés par le devoir impérieux de réduire drastiquement nos émissions de GES et donc de s’affranchir du recours systématique aux énergies fossiles.

Pourtant, les projections d’extraction des énergies carbonées laissent penser que cette
trajectoire d’émissions n’est pas soutenable. Le progressif épuisement des réservoirs souterrains est un sujet d’étude résumé parfois à la prédiction de la date du “pic pétrolier” (ou “ peak oil” ). Des organismes internationaux et la littérature scientifique issue des études en géologie et en énergie nous informent sur l’incertitude de la durabilité de l’extraction des énergies fossiles. L’exploitation de nos 100 millions de barils de pétrole quotidiens reste particulièrement mieux documentée par rapport au charbon et au gaz, d’une part parce que c’est la principale source d’énergie mondiale, mais surtout parce que de son utilisation dépend le reste des exploitations, le pétrole représentant 95% de l’énergie utilisée pour le transport (BP, 2018).

Le croisement du réchauffement climatique et des études pétrolières relève de la “science
post-normale”, pour reprendre la formule du philosophe des sciences Jerome Ravetz. Car la déplétion énergétique ne peut se mesurer en laboratoire, ni être démontrée de façon empirique. Selon Ravetz, dans ces domaines, “ les faits sont incertains, les valeurs en débat, les enjeux forts, et les décisions urgentes ” (Ravetz, 2004). Les faits sont incertains dans la mesure où les quantités de pétrole extraites du sol sont mesurées selon les déclarations des différents pays, de même que leurs réserves ; les valeurs sont en débat car les classifications divergent selon l’organe de publication ; les enjeux sont forts car ces questions touchent au fonctionnement de notre société ainsi qu’à l’habitabilité de la
planète dans les décennies à venir ; et les décisions urgentes car les délais, tant pour la question climatique que pour le déclin pétrolier, sont très courts pour envisager sereinement et de manière globale une transition vers un nouveau monde résilient face à ces problématiques.

Ce travail sera l’occasion de croiser les données des études climatiques et géologiques, pour tenter de déterminer dans un premier temps si l’épuisement des énergies fossiles est imminent ou incertain. Puis, à partir de l’élaboration de scenarii énergétique et climatique, nous tenterons d’envisager la soutenabilité des trajectoires les plus climaticides. Enfin, nous reviendrons sur la nécessité de médiatiser cette hypothèse, et sur la difficulté de publication d’articles traitant de cet enjeu.

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